The ASP Hollywood Tour, Saison 1 épisode 7 : Teahupoo

Tubes béants, adrénaline, sang, larmes de joie et de douleur dans un contest historique : le Billabong Pro Tahiti décrypté par Franck Lacaze...

30/08/2014 par Romain Ferrand

Tubes béants, adrénaline, sang, larmes de joie et de douleur dans un contest historique qui a épuisé tous les superlatifs et confirmé ce que l’on avait presque oublié : Kelly et John John (et Teahupoo) sont hors normes… mais c’est Gaby qui triple la mise en prend le large !

Bienvenue dans l’ASP Hollywood Tour vu par Franck Lacaze* !

Gabriel Medina est grand ! Dans un Teahupo’o annoncé dantesque dès les premiers jours de la waiting period, le bambin de Maresias qui étrennait son lycra doré de leader du classement pour la cinquième fois cette saison (en six apparitions) était attendu au tournant par nombre d’observateurs/commentateurs/chroniqueurs. Certains étaient au mieux réservés, d’autres lui prédisaient l’enfer. C’est à peine si Gaby a sourcillé. Alors que tout autour de lui n’était que tumulte, peur et violence, il ne s’est jamais départi de son flegme et a traversé cette historique septième étape du WCT avec l’aplomb et l’assurance des plus grands. Le parfait dosage de talent, de tactique, de sang-froid et des cojones taille XXL qui l’ont emmené sans trembler jusqu’en finale où il a dominé la référence absolue de l’épreuve, King Kelly. Si certains en doutaient encore, ce Gaby-là nous a démontré qu’il possède l’étoffe d’un futur champion du monde.

Dans l’épisode précédent

Quelques semaines plus tôt en Afrique du Sud, sixième étape de l’ASP World Tour…

Après un début de saison marqué par un sérieux ébranlement de la hiérarchie, les tauliers ont profité du retour de J-Bay au calendrier du World Tour pour renvoyer les insolents boutonneux à leurs bacs à sable. Et qui d’autre que les deux derniers champions du monde pour remettre les pendules à l’heure dans un Supertubes absolument parfait ? À grands coups de carves assassins et de tubes au cordeau Joel Parkinson et Mick Fanning, déjà doubles lauréats ici, ont réglé leur compte à tous ces freluquets… Et en finale, comme c’est désormais systématique entre les “ex-Coolie kids“, c’est l’électrique blondinet qui aura eu le dernier mot. Un podium qui permettait alors aux Australiens de se replacer au sommet du classement pour aborder en confiance un Tahiti Pro où ils étaient finalistes il y a deux ans.

Teahupoo a toujours faim

Et quoi de mieux qu’un Teahupo’o affamé pour réaffirmer son statut ? Après une édition 2013 timide, le Teahupoo 2014 a décidé de montrer ses muscles. Dès le coup d’envoi, cylindres mutants et lèvres gourmandes vont égratigner les chairs et les égos… et notamment au sein du Top 10. Taj Burrow, Adriano De Souza, Nat Young et Josh Kerr vont se faire éjecter sans ménagement avant le round 4. Et pour les accompagner : Parko et Fanning respectivement battus par Brett Simpson et Dion Atkinson. L’embellie aura été de courte durée pour les Goldie boys.

Ciel sombre également sur le contingent brésilien pourtant si fringuant depuis le début de saison qui ne va qualifier qu’un seul représentant (sur six alignés) au-delà du round 3.

La revanche des “sans-grades”

Les complices du massacre ? Des surfeurs de fond de classement au lycra de la même teinte que le blues qu’ils trainent depuis le début d’année. Des “sans-grades“ qui vont compenser leur déficit statutaire par un surcroît d’engagement. Brett Simpson, qui n’avait plus remporté le moindre heat sur le WCT depuis le Pro France 2013 et remis en confiance après une demi-finale à l’US Open dans son jardin (à nains) d’Huntington Beach. Le rookie Dion Atkinson, futur quart de finaliste, que nul n’attendait à un tel niveau d’engagement à part peut-être ceux qui le côtoient chez lui en Australie du Sud, région réputée pour ses spots sauvages infestés de grands requins blancs. Ou encore un Tiago Pires qui a rappelé au milieu de cette saison crépusculaire qu’il demeure l’un des meilleurs tuberiders backside du plateau.

Les gladiateurs de Hava’e

Et il y a eu les gladiateurs qui ont fait de la passe de Hava’e leur Colisée. Bede Durbidge, l’ex-numéro 2 mondial, inattendu demi-finaliste et tombeur dans la série la plus lente du cinquième tour du héros local Michel Bourez (9ème). Kai Otton qui a attendu l’une de ses étapes fétiches (demi-finaliste en 2013) pour franchir enfin le round 3, se jetant à corps perdu dans quelques-uns des take-offs les plus ébouriffants du contest. Le frisé de Tathra signera quelques-uns des wipe-outs les plus sévères du contests, pas mal de voyages dans le lagon, et un joli bon de commande pour son shaper… Et accessoirement quelques bombes –dont un 10- lui assurant une 9ème place. Et que dire de Kolohe Andino dont les épaules de moins en moins frêles supportent (avec celles de Nat Young) le futur du surf yankee ? Le kid de San Clemente, 20 ans, a promené son apparente décontraction jusqu’en quarts (5ème) où il a buté sur son alter-égo brésilien Gabriel Medina. Sa troisième saison sur le WCT confirme enfin l’éclosion de son immense talent.

Kelly, John John… et les autres

Après avoir perdu Michel Bourez à ce fatidique 5ème tour que le Spartan n’a toujours pas franchi en six participations, ses supporters vont rapidement se consoler lors d’une ultime journée qui va offrir un spectacle tantôt magique, tantôt effrayant mais totalement hypnotique. « Le plus beau contest que j’ai jamais vu ! » confessera Kelly Slater. Et le Divin Chauve va comme souvent largement y contribuer avec John John Florence, ange blond qui comme son illustre aîné n’est jamais aussi hallucinant de facilité que lorsque les vagues offrent une perfection majuscule.

Jusqu’à se retrouver opposés en demie dans ce qui était pour beaucoup une finale avant l’heure, Kelly et “Double Jay“ vont livrer un exceptionnel récital de drops himalayens et de tubes backside quasiment tous exécutés “no grab“ et collectionner les scores extravagants : sept vagues –sur huit- notées au-delà de 9 pour JJF, huit scores pour Kelly en trois séries surfées. Et leur demi-finale va nous offrir la plus incroyable série jamais surfée en compétition qui accouchera d’une égalité parfaite à l’issue des 35 minutes : 19,77 points. Entre le plus grand compétiteur de tous les temps et le meilleur surfeur du futur (mais piètre compétiteur), les juges ont donc décidé de ne pas décider. C’est donc le règlement qui le fera pour eux : à la faveur d’un meilleur score plus élevé (10 contre 9,90 points, sic !) c’est le doyen qui rejoindrait Gabriel Medina en finale.

Gaby, oh Gaby !

Moins flamboyant frontside que Kelly ou John John dont la “bravitude“ (© Ségolène Royal) backside n’a pas d’égal, le goofy auriverde va pourtant signer un parcours exemplaire avec énormément de justesse dans ses trajectoires, une concentration de tous les instants et beaucoup d’application dans son choix de vagues, sans oublier ce sens tactique aigu qui va le voir, notamment, livrer une bataille de rame ahurissante dans son quart face à Andino. Et c’est tactiquement que Medina va prendre l’ascendant dans sa finale face à Slater. Sur un premier drop refusé par le Floridien, le Pauliste va profiter de la priorité abandonnée par Kelly pour démarrer sur la vague suivante et dicter son rythme en mettant très rapidement son adversaire en situation de combinaison. Condamné à courir après le score, Slater, quadruple vainqueur ici, va amorcer son retour en se concentrant sur des tubes –un peu- moins gros mais –un peu- plus profonds. Après un 9,63 déniché à mi-série, Slater va multiplier les vagues en quête d’un 9,33. Un ultime barrel négocié à 30 secondes du terme sous la priorité du Brésilien entretiendra le suspense. Le verdict sera implacable : 9,30 points ! Soit 0,03 en-deçà du score requis. Trois centièmes synonymes de troisième victoire cette saison pour Gaby et d’envolée au classement mondial.

Dans les instants qui ont suivi la finale la côte de Gabriel Medina à Pipeline serait remontée en flèche chez les bookmakers. Ses chances de titre mondial avec…

Dans le prochain épisode

On redescend son taux d’adrénaline et on oublie les tubes béants. Cap sur la Californie et le pic “haute performance“ de Lower Trestles où la victoire se jouera sur les enchainements de manoeuvres. Carves, top turns et airs rythmeront ce contest spectaculaire (si, si) qui, hormis les succès de Taj Burrow l’an passé et Mick Fanning en 2009, est resté la chasse gardée de Kelly Slater (6 trophées entre 2005 et 2012). Le Kelly Slater version 2014 (lisez moins impérial dès qu’il s’éloigne des récifs pacifiques) parviendra-t-il à reprendre son bien ?

Réponse à partir du 9 septembre.

* @FranckLacaze : ancien surfeur pro, rédacteur en chef du magazine Trip Surf de 2000 à 2007, commentateur de l’ASP World Tour sur la chaine MCS Extrême (Canalsat 127 ou Numéricable 153).


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12 commentaires

  • taapuna
    4 septembre 2014 12h26

    Comme Kelly au début, Medina doit prouver qu’il sait charger. Encore 2-3 victoires à teahupoo et à pipeline.

    « Tiago Pires […]l’un des meilleurs tuberiders backside du plateau » … quand les vagues ne dépassent pas 2 mètres. Pauvre taj, éliminé de la sorte.

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  • sedzen99
    2 septembre 2014 13h17

    Les réactions sont effectivement totalement démesurées. Perso, je prends plaisir à lire ces compte-rendu agréablement rédigés et avec un peu de couleurs. Et je remercie l’auteur de bien vouloir continuer à donner son avis, qui – jusqu’à preuve du contraire, n’engage que lui…

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  • z
    2 septembre 2014 8h53

    Euh… je vois pas vraiment où sont les propos anti-brésiliens chez Franck Lacaze… regardez plutôt du côté de certains commentateurs us et oz de l’asp… Après le florès bashing, le Lacaze bashing maintenant ?

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  • ilo
    1 septembre 2014 14h31

    Relis mieux alors

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  • garden73
    1 septembre 2014 11h18

    Quelle mauvaise foi ! Juste incroyable. Qu’est-ce qu’il ta fait le Franck Lacaze pour que t’écrives des trucs pareils ? J’ai beau relire, je trouve qu’il rend à césar … Ce qui lui appartient.

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  • SURF
    1 septembre 2014 11h16

    Tout a fais d’accord avec toi ilo ! Ce monsieur Franck Lacase dois traîner avec lui un certain complexe de sa carrier de surfeur pro, je sais pas, mais c’est certain qu’il dois progresser et rester impartiale, neutre sur ces mots sur un site comme SURFSESSION ! C’est une évidence qu’il n’aime pas les surfeurs en dehors du cercle anglo-saxon !

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  • ilo
    1 septembre 2014 10h05

    alala…il a beau essayer FL n’arrive pas à cacher son mépris pour les brésiliens. GM éclate tout depuis le début de la saison, gagne deux events dés sa première DEMIE saison sur le tour, à 17/18 ans, gagne Fiji et Teahupoo, sait tout faire mieux que les autres…et FL doit (c est plus fort que lui) conclure par un indiscutable « JJF meilleur surfeur du futur » (comprendre: il est meilleur que Medina mais n’est pas N°1 car il n’a pas le détestable sens tactique du brésilien) . T’es trop fort Francky! Petite question: as-tu une seule fois pensé au fait que Medina n’a pas grandi devant Pipeline?

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  • garden73
    1 septembre 2014 6h52

    Je pense que c’est une façon de parler… Il est moins tacticien que beaucoup… Et c’est ce qu’on aime chez lui.

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  • SURF
    31 août 2014 19h57

    Merci Franck Lacaze ! On te remercie pour tes charment commentaires. Mais s’il te plaît, pars en vacances, prend-toi une dizaine d’année sabbatique… ce serai vraiment trop cool !

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  • bubz
    31 août 2014 17h06

    Mais meilleur surfer du futur, oui oui on en est déjà sûrs !

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  • Franck
    31 août 2014 10h04

    @ Mwa : puisque tu sembles ne pas partager cet avis (ce qui est ton droit), je veux bien que tu nous expliques en quoi JJF n’est pas « un piètre compétiteur ». À moins que ne jamais franchir le round 3 (à l’exception de Bells, Fidji et Tahiti) cette saison et ne terminer la saison 2013 à une mirobolante 10ème place -quand on a le talent pur d’un potentiel champion du monde- suffise à tes yeux à être « un bon compétiteur » ? 😉

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  • Mwa
    30 août 2014 18h29

    « John John piètre compétiteur » qu’est ce qu’on lit pas comme connerie ici…

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