Saga World Tour : Woody, responsable de la sécurité

Son bouc, son anneau à l'oreille, son crâne rasé et ses lunettes font de cet Australien une des "gueules" de toutes les grosses compétitions surf de la planète. Rencontre :

14/11/2011 par Romain Ferrand

David « Woody » Wood gère la sécurité de compétitions de surf depuis 20 ans. Chargé d’encadrer toutes les épreuves ASP World Tour et les gros événements comme l’US Open, il a suivi l’évolution du surf pro et le nombre grandissant de spectateurs sur les plages au fil des ans.

Assurant la sécurité des surfeurs lors de leurs entrées et sorties dans l’eau, il fend la foule mieux que personne, et son crâne rasé, son bouc ainsi que ses grosses lunettes de soleil font de lui une des « gueules » de la caravane du World Tour.

Mais son rôle ne se limite pas à jouer des coudes sur la plage, et Woody tient à démystifier l’image du « security guard », à plus forte raison dans un univers comme le surf. On l’a rencontré lors du Rip Curl Pro Portugal pour en savoir davantage. Magnéto :

Woody, pourrais-tu te présenter en quelques mots ?

Je suis le Manager ASP de la sécurité pour le World Tour. Il y a longtemps, dans les années 80, je surfais dans des compétitions en Australie, donc je suis surfeur à la base. D’un autre côté, je travaillais comme agent de sécurité. Au fil des ans j’ai commencé à travailler pour une compagnie qui avait un contrat avec le Rip Curl Pro Bell’s Beach. Je suis donc allé travailler sur cet événement où je connaissais déjà tout le monde. Quelques années après, j’ai bougé dans le Queensland (Australie), où j’ai racheté une compagnie de sécurité. Cette année là, le contrat qui liait le Rip Curl Pro Bell’s à mon ancien patron s’est terminé. Les organisateurs de la compétition m’ont alors appelé et m’ont dit : « Woody, est-ce que tu veux diriger la sécurité du Rip Curl Pro Bell’s« . C’était il y a 20 ans. Chemin faisant, j’ai commencé à m’occuper d’un événement, puis de deux, et j’ai évolué au fil des ans en travaillant de plus en plus. Maintenant, je suis à temps plein sur le Tour depuis 2 ans.

Ton rôle est donc d’encadrer l’équipe qui s’occupe de la sécurité sur le Tour ?

C’est un peu plus compliqué que ça, on est beaucoup plus investis. Je passe beaucoup de temps avant les événements avec les organisateurs et les marques pour établir de nouvelles règles de sécurité et faire des plans de management de sécurité, afin de proposer des projets déjà mis sur pied pour qu’ils voient que nous sommes de vrais professionnels dans ce que nous faisons. Il s’agit ensuite d’aider l’organisation de l’événement dans la gestion du budget, en s’assurant que tout est viable en suivant les lignes directives avant que l’événement ne commence. Je dois m’assurer que nous avons un bon staff de sécurité et puis le diriger une fois que la compétition commence, afin d’être sûr de délivrer ce que nous avions promis. Enfin, une fois que tout est en place, je dois veiller sur les mecs du Tour et m’assurer qu’ils aient la meilleure protection possible.

[DANS LES GRANDES VILLES COMME RIO OU HUNTINGTON [—] LE NIVEAU DE SÉCURITÉ DOIT ÊTRE ÉNORME]

L’arrivée du Tour dans les grandes villes a dû considérablement changé ta façon de travailler ?

Chaque événement est un challenge, spécialement quand on l’organise dans un endroit loin de tout. Les événements à distance sont une bonne chose dans le sens où ils ne nécessitent pas beaucoup de sécurité. Mais dans les grandes villes comme Rio ou Huntington par exemple où j’organise l’US Open, le niveau de sécurité doit être énorme. C’est donc plus facile pour moi quand les compétitions sont organisées loin de tout car le risque est beaucoup moins élevé. Mais les deux ne me dérangent pas, je m’occupe de tout. Ils pourraient nous envoyer sur la Lune, ça ne me dérangerait pas.

Tu passes beaucoup de temps sur le Tour avec tous les surfeurs. Quel type de relation as-tu développé avec eux ?

J’ai une très bonne relation avec tous les surfeurs du Tour, même avec les anciens, ceux qui se sont retirés. Je reste en contact avec eux, notamment avec Sunny Garcia par exemple, qui a été un de mes surfeurs favoris. Il y a bien évidemment Kelly, je suis à ses côtés sur le Tour depuis 20 ans, mais aussi des gars comme Pottz (Martin Potter) ou Damian (Hardman) qui sont restés longtemps sur le Tour. A leurs débuts, je m’occupais déjà de la sécurité et je le fais toujours aujourd’hui, j’ai donc gardé une très bonne relation avec eux. Je m’entends aussi très bien avec certains jeunes qui sont arrivés récemment, comme Jadson (André) par exemple.

[ILS POURRAIENT NOUS EMMENER SUR LA LUNE, CA NE ME DÉRANGERAIT PAS]

Arrivés en phases finales, les mecs sont très concentrés et parfois stressés. Leur parles-tu pendant que tu leur frayes un chemin dans la foule vers l’eau ?

Généralement, j’essaye de rester le plus neutre possible, parce que c’est difficile de trouver un équilibre entre l’attention que tu portes à l’un ou à l’autre. Malgré tout, j’essaye quand même dans ces moments là d’encourager les surfeurs qui sont en bas de classement, pour les pousser un peu plus, tout en essayant de les traiter tous avec respect et de la même façon. Mais c’est bon de voir de temps en temps des gars qui n’ont pas l’habitude de l’emporter faire de bons résultats.

Quel surfeur est selon toi le plus proche de ses fans ?

Ca dépend vraiment des jours. Tous les gars aiment signer, tous les gars aiment parler au public. Kelly est fantastique, quand il finit son heat, il pourrait signer un autographe à tout le monde jusqu’à ce qu’il n’y ait plus personne, en restant sous le soleil pendant trois heures. C’est assez impressionnant. Il suffisait aussi de regarder Freddy (Patacchia, ndlr) par exemple aujourd’hui, lorsqu’il s’est fait éliminé (lors du Rip Curl Pro Portugal ndlr). Il a donné sa board, puis son lycra, et le temps qu’il arrive jusqu’à l’espace surfeurs il était presque à poil. Si les gars ont passé une bonne journée, ils prennent le temps. Cela dépend aussi de l’endroit où ils surfent. C’était par exemple important pour Tiago d’être à l’aise puisqu’il était chez lui. Nous avons donc essayé d’y prêter attention et de lui faciliter les choses parce que sa famille et ses amis étaient là. C’est une fierté de surfer dans son pays.

Quelle est ta compétition favorite sur le Tour ?

C’est difficile à dire, il y en a plein et pour différentes raisons. Celle qui a lieu chez moi, à Bell’s, est probablement celle que je préfère parce que c’est celle sur laquelle je travaille depuis le plus longtemps. J’aime aussi vraiment Trestles, c’est un événement génial à organiser. Chaque endroit sur ce World Tour a ce petit truc unique qui fait sa particularité. Ce qui est fantastique c’est qu’à chaque endroit où nous allons, une vraie famille nous y attend et on y retrouve des gens que l’on connait.

[RÉUSSIR A EMMENER KELLY HORS DE L’EAU JUSQU’AU PODIUM A PUERTO RICO A ÉTÉ UN DES JOBS LES PLUS DURS QUE J’AI JAMAIS EU À FAIRE]

Est-ce que tu peux nous raconter un des moments les plus dingues que tu aies vécu sur le Tour ?

Sans aucune hésitation, le 10ème titre de Kelly et la disparition d’Andy. En 20 ans de carrière, c’est probablement ce qui restera gravé dans ma mémoire à jamais. Ressentir une émotion aussi extrême dans la tristesse puis dans la joie, je m’en souviendrai toujours. J’étais sur la plage au moment de la victoire de Kelly à Puerto Rico. C’était le chaos. Il y avait tellement d’émotion dans la foule ! Tout le monde était resté là toute la journée à passer un bon moment et à boire. C’était dur à gérer. Quand il a gagné, ils voulaient tous l’agripper, le féliciter. Réussir à emmener Kelly de l’eau jusqu’au podium à ce moment là a été un des jobs les plus durs que je n’ai jamais eu à faire. C’était fou, l’émotion était vraiment forte.

Tu surfes encore aujourd’hui ?

Je continue, oui, mais je ne trouve pas toujours le temps. Si tu arrives à ce que les gars du Tour te donnent des conseils et à surfer sans qu’ils ne soient dans l’eau, c’est génial. Mais généralement ils sont tellement bons maintenant que tu sors de l’eau parce que tu ne peux même pas attraper une vague ! (rires) Ces dernières années, j’ai donc quasiment abandonné l’idée de prendre ma planche avec moi parce que c’est pour ainsi dire mission impossible.

Merci Woody, bonne continuation sur le Tour.

PROPOS RECUEILLIS PAR OLIVIER HAMELIN


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