Des Français frôlent le drame au large de Java

Balayé par une vague, leur bateau a coulé loin de tout et à la tombée de la nuit. Mais l'histoire ne s'arrête pas là... Récit.

30/12/2016 par Romain Ferrand

Publié initialement le 15 juin 2016

Ca devait être un voyage surf à la cool en Indo entre potes. Mais ce boat-trip a failli tourner au drame pour Pierre, Hugo, Yoan, Gautier B et Gautier M. Le bateau sur lequel ils ont embarqué pour quelques jours sur l’île de Panaitan, au large de Java, a coulé suite aux négligence de son capitaine indonésien. L’occasion de rappeler les dangers potentiels de telles expéditions, et l’importance d’être bien équipé en toutes circonstances…

Pierre, l’un des Français impliqué, nous raconte ce boat-trip qui a tourné au fiasco :

« On était 4 à être partis sur Java. On avait rejoint des potes de potes à Cimaja, mais la houle est devenue trop grosse. Là, on a rencontré un type qui organisait des sorties surf et qui nous a proposé un boat trip de 3/4 jours du côté de l’île de Panaitan, et on s’est laissés tenter. On a donc embarqué tôt le matin sur un bateau avec le capitaine et le skipper, tous deux Indonésiens.

Après quelques heures de traversée on est arrivés sur le spot de Napalm où il y avait déjà 2 ou 3 bateaux d’Australiens. Puis on a décidé de bouger sur un autre spot, Inside Left, situé dans une baie. Le bateau est rentré dans la baie pour y jeter l’ancre. Les conditions étaient top, entre 2m et 2,5m. Vers 17h, on est remontés sur le bateau et le capitaine a voulu aller s’abriter dans une autre baie pour la nuit.

Sauf que la houle avait grossi et que Inside Left et la droite, Inside Right, commençaient à connecter au milieu de la baie. Le capitaine a quand même fait un tout droit pour sortir. On n’était pas rassurés mais on s’est dits qu’il savait ce qu’il faisait. On a passé deux vagues vraiment limite, le bateau à chaque fois quasi-dressé à la verticale . On était trois potes à l’avant, deux l’arrière, à serrer nos boardbags et nos affaires. Après la deuxième vague, le moteur du bateau s’est arrêté. Et là, la 3ème vague est arrivée et nous a cassé dessus.

On a tous volé, un de nos potes est tombé à l’eau, l’un de devant a reçu un montant à la tête et un autre a reçu une glacière pleine – on partait pour plusieus jours – dans la cage thoracique contre la cabine avant. C’était la panique. Mais on pensait que ça allait passer. Sauf que notre pote qui était dans l’eau nous a dit « regardez, l’arrière du bateau est arraché, il va couler !?. Il a sombré en environ 45 secondes. On a pu récupérer deux, trois sacs dont l’un avec une trousse à pharmacie, tout le reste du matériel et les planches étaient éparpillées autour du bateau. On s’est répartis les gilets de sauvetage qui heureusement se trouvaient sur le bateau. Les Indonésiens qui ne savaient pas nager se sont en plus accrochés à un boardbag.

Notre pote qui avait reçu la glacière dans la cage thoracique allait vraiment mal. On l’a mis sur une planche et on nageait à ses côtés. On a mis 30 minutes à atteindre l’île. Il a d’ailleurs fallu retourner dans l’eau chercher les Indos qui n’arrivaient pas à passer le courant. La nuit commençait à tomber.

On a rassemblé les affaires sur la plage, les téléphones étaient HS, tout comme mon matos photo ainsi que les bagages et les passeports qui se sont retrouvés au fond de l’eau. Les briquets, eux, marchaient toujours, on ne sait pas comment. Deux d’entre nous sommes partis chercher du bois pour faire du feu (3 feux ) pour éventuellement se faire repérer rapidement par un bateau tandis, tandis qu’un autre – dentiste, qui avait donc fait médecine – s’est occupé de notre pote blessé sur qui on avait étendu une couverture de survie. Certains d’entre nous étaient en état de choc. La nuit a été longue. La marée montante sur cette plage minuscule ne nous a pas aidé, on a aussi vu des serpents, et on a appris après qu’il y avait même quelques crocodiles dans le secteur.

En cherchant du bois on est tombés par chance sur une source d’eau douce. J’avais des pastilles de purification d’eau dans ma trousse à pharmacie, deuxième chance ! On a ramassé des bouteilles vides (réserve naturelle malheureusement très polluée) qu’on a rempli, et il a fallu se rationner à 33cl chacun.

A 5h30 le lendemain matin, deux potes et le skipper sont partis sur l’île à la recherche de secours. Ils voulaient retrouver les Australiens croisés la veille à Napalm. Ils pensaient mettre 1 heure de marche mais ils ont mis 3h30 car les Australiens étaient sur un autre spot (voir carte) ! Ils avaient emprunté le sifflet que j’ai toujours avec moi. Ils se foutaient toujours de mon sifflet mais il nous a bien servis à ce moment-là : l’un des Australiens les a repérés et récupérés, et ils sont tous venus nous chercher par la mer. On a transporté notre pote blessé sur une planche en guise de brancard. Il y avait un toubib sur le bateau, qui a diagnostiqué des côtés pétées et un pneumo-thorax, mais nous a tous rassurés sur son état global.

Ils nous ont ramené au port en speed-boat – sauf le blessé, qui lui a mis un peu plus de temps – on était en short, sans t-shirt, sans slaps. Des Indos sympas nous ont filé quelques fringues, et on a commencé par aller retrouver le propriétaire du bateau, qui nous a remboursé.

Puis on est allés à Jakarta pour signaler l’incident et déposer notre pote blessé à l’ambassade de France, où on a été super mal reçus. Ils nous ont faits attendre 4h, ont douté du diagnostic de la blessure de notre pote et nous ont laissé comme ça. Heureusement on avait encore deux cartes bleues en état de marche et on a pu se loger à l’extérieur. Surtout, on est tombés sur un couple de Français installés à Jakarta qui a entendu notre histoire et nous a accompagné à la Police, à l’Immigration, payé le taxi… Heureusement qu’ils étaient là.

Trois d’entre nous sommes rentrés en France le 5 juin, mais notre copain blessé est parti à l’hôpital à Jakarta. Il n’a toujours pas pu prendre l’avion à cause de son pneumo-thorax. Il faut attendre qu’il se résorbe. Le 5ème pote est resté à ses côtés. Ils doivent rentrer le week-end prochain.

Après coup, on se dit qu’on a eu pas mal de chance, surtout notre pote. On sait qu’on n’aurait peut-être pas dû monter sur ce bateau, mais le type avait l’air sérieux. On a perdu nos téléphones, nos bagages, nos passeports et moi mon matos photo, mais on relativise en se disant qu’on est toujours là ! Et j’ai pu miraculeusement récupéré la carte SD qui fonctionnait encore (d’où les dernières photos du bateau et de leurs vacances présentes dans l’article, ndlr).

Si on raconte cette histoire aujourd’hui, c’est pour alerter sur les dangers de ce genre de trips. Il faut toujours bien se renseigner et savoir avec qui on part, si le capitaine est expérimenté et s’il connait le coin ou non, avant de prendre la mer. On tient aussi à pousser un coup de gueule contre l’ambassade de France qui nous a clairement mal reçus vu la situation et l’état de notre pote…?

L’île de Panaitan :


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9 commentaires

  • Pascal31
    24 juin 2016 16h09

    Cette mésaventure ne m’étonne pas,il y a une douzaine d’années on avait aussi failli couler au large de Panaitan, l’équipage de notre bateau de pêche était composé d’un gamin, sorti de l’école par le chef du village, et d’un réparateur de mobylette en guise de capitaine !Il a fallu s’énerver pour leur faire adopter les règles basiques de navigation et de sécurité au mouillage …et pour la nourriture merci à mon fusil harpon et à un groupe d’Australiens sur un beau yacht qui a eu pitié de nous !…au moins ça fait des souvenirs 😉

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  • Deruelle Valentine
    20 juin 2016 20h50

    La prochaine fois emmenéz une infirmière comme moi 😉
    Enorme pensée pour vous les riders !

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  • Pierre
    17 juin 2016 11h39

    Bonjour Paul , je suis un des rescapés , nous avions tous les PSC1 , mais lors d’un pneumothorax ce ne sont pas des gestes que l’on apprend malheureusement , mais c’est sur que lorsque l’on s’engage dans ce type de trip , il vaut mieux être équipé , et préparé à tout ! Nous sommes en vie , et d’ailleurs les 2 derniers qui étés encore sur Jakarta (dont le blessé) viennent de rentrer aujourd’hui avec le sourire 🙂 Merci pour les commentaires et le partage
    PS : je ne parlerais pas de l’ambassade ici (ca pourrait être sale !) , mais je suis en train de rédiger un courrier pour les grosses têtes là-haut car ce n’est vraiment pas normal d’être traités comme ca !

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  • nicky
    17 juin 2016 7h35

    A bien l’ambassade!!!ont peux compter sur les français pour avoir de l’aide dans des moment de galère!!Pas sympa!!

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  • antony colas
    16 juin 2016 12h42

    Quand certains clients de bateaux bien équipés se plaignent que leur lit n’est pas confortable, que la clim’ ne marche pas bien, que la nourriture est moyenne et parlent de trip abominable, peut-être devraient-ils lire ce récit ! Y’a galère et galère !

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  • ALLARD Paul
    16 juin 2016 11h38

    Bravo à vous les sportifs courageux.Il y a eu heureusement pour vous tous une grande part de chance et surtout la présence de ce médecin.Il faut absolument que vous fassiez un stage de premiers secours car vous évoluez ( et les baigneurs inexpérimentés aussi) dans un milieu dangereux, même s’il est magnifique.Vous sauverez des vies en apprenant à mettre en survie des accidentés de la mer le temps que d’autres secours arrivent.Quelle belle histoire de pouvoir sauver une vie et peut-être un jour celle d’un pote.Et bon surf !!

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  • Jah64
    16 juin 2016 6h58

    Les gonz de l’ambassade ils sont payés des milliers d’euros par mois pour bronzer sur les plages mais faire leur boulot, c’est trop leur demandés!! et tous ça payés avec NOS IMPOTS!!!! WTF! Bravo aux surfeurs survivors qui ont su garder la tête froide et ça se n’est pas de la chance 😉

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  • franck
    16 juin 2016 6h23

    Lé fote dortograf ne redores pa le blasons de surfessesion

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  • ben soussan
    16 juin 2016 5h18

    vous êtes toujours en vie c’est le principal.
    Quant aux ambassades….

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