Serait-on en train d’assister à un désastre écologique dans les Caraïbes ?

La menace vient d'un pétrolier vénézuélien inactif qui prendrait l'eau et menacerait de déverser 1,3 million de barils de pétrole près des côtes de Trinidad et Tobago.

21/10/2020 par Marc-Antoine Guet

C’est une information qui semble être passée sous les différents radars nationaux ces derniers jours. Pourtant, ce qui se joue actuellement au large des côtes de Trinidad et Tobago n’a rien d’anodin, bien au contraire. 
Un désastre écologique sous couvert d’enjeux géopolitiques
Le pétrolier FSO (Unité Flottante de Stockage et de Déchargement d’Hydrocarbures) Nabarima, construit en 2005, contient plus d’1,3 million de barils de pétrole, d’une valeur actuelle de 300 millions de dollars. Détenu conjointement par la compagnie pétrolière nationale vénézuélienne Petroleos de Venezuela (PDVSA) et Eni, le géant pétrolier italien, le Nabarima est immobilisé depuis presque un an, à cause des sanctions des États-Unis imposées au Venezuela
Le Nabarima, battant pavillon vénézuélien, est donc coincé dans le golfe de Paria (entre le Venezuela et Trinidad et Tobago) depuis janvier dernier, après que des sanctions américaines contre le Venezuela aient rendu illégal le commerce des entreprises qui opèrent aux États-Unis avec la compagnie pétrolière publique du pays.

L’administration Trump tente en effet d’évincer Maduro, qu’elle qualifie de dictateur.

Le navire pétrolier aurait été abandonné à un niveau proche de sa capacité maximale de transport lorsque les États-Unis ont imposé pour la dernière fois des sanctions au régime socialiste vénézuélien. Les plaintes indiquent l’abandon total d’un navire ayant une importante cargaison de pétrole alors que celle-ci se détériore en mer.
Si la géopolitique n’impliquait pas directement une menace écologique ça irait. Mais gros problème, au cours des deux dernières semaines, des groupes environnementaux ont exprimé leurs inquiétudes quant à un éventuel déversement des 1,3 million de barils de brut présent à bord de l’installation pétrolière après que des images aient montré le navire basculant sur le côté.
D’après des informations de Martinique 1ere, au mois d’août, l’eau de mer avait déjà inondé la salle des machines. Eudis Girot, directeur de la Fédération des Travailleurs Pétroliers de Venezuela (Futpve) avait alors dénoncé le mauvais état du pétrolier et la détérioration de l’équipement.


Le Venezuela nie tout en bloc
Le pays dirigé par Nicolas Maduro, a précédemment déclaré que le navire était sûr. Mais cela n’a pas convaincu les militants environnementaux et les politiciens qui disent que de nouvelles images montrent le navire s’inclinant à un rythme accru.
« Les dommages environnementaux qui pourraient être causés par la marée noire dans cette importante zone aquatique seraient plus qu’une catastrophe. Nous ne pouvons pas laisser l’insouciance, l’irresponsabilité et le manque de conscience environnementale du régime de Nicolas Maduro mettre fin à la pêche », a déclaré samedi le député de l’opposition Robert Alcala sur Twitter.
De son côté, le directeur de PDVSA (Petroleos de Venezuela), Pedro Figuera avait écrit sur son compte Twitter « qu’après des travaux de stabilisation effectués en septembre 2020, le Nabarima était à nouveau conforme aux normes internationales de sécurité ». Ce même PDVSA avait déjà publié une déclaration le 5 septembre dernier dans laquelle il assurait que le Nabarima « disposait de toutes les conditions opérationnelles et de sécurité, ne constituant en aucune façon une menace pour l’écosystème de la zone ».


À cette occasion, la compagnie pétrolière d’État avait accusé les politiciens et les médias de s’unir pour nuire à l’industrie pétrolière nationale. « En plus d’utiliser la crainte d’éventuels dommages écologiques pour justifier le blocus criminel et les sanctions des Etats-Unis contre le Venezuela », avait-t-elle déclaré.
Le ministère des affaires étrangères de Trinidad et Tobago a indiqué lui dans un communiqué qu’il était en état d’alerte pour la menace qu’une marée noire pourrait causer. Le ministère a déclaré que son équipe d’experts était prête à se rendre sur place pour inspecter la zone où le navire est en train de chavirer.
D’autres pétroliers à la rescousse
Un pétrolier exploité par la compagnie pétrolière nationale vénézuélienne Petroleos du Venezuela (PDVSA) s’est approché hier du Nabarima où il devrait recevoir du pétrole brut par transfert en mer dans un contexte de préoccupations environnementales.
PDVSA (Petroleos du Venezuela) prévoit maintenant de décharger une partie du brut à bord via un transfert de navire à navire impliquant ce pétrolier de secours appelé l’Icaro, navire détenu par le PDVSA. C’est ce qu’a déclaré lundi à Reuters une personne proche du dossier. Les données montrent bien que l’Icaro a approché le Nabarima à 14h37 heure locale hier. 
La barge Inmaculada, battant pavillon vénézuélien, devait également participer à l’opération. Opération complexe qui, selon une personne connaissant bien le sujet, comporte des risques. C’est ce que nous apprend Reuters
Le pétrolier Icaro, d’une capacité de 600 000 barils de brut, pourrait alléger le fardeau du navire de stockage et de déchargement de pétrole Nabarima, qui serait en train de couler dans le golfe de Paria, entre l’État de Sucre et l’île de Trinidad. Cependant, la manière dont le transfert serait effectué n’est pas tout à fait claire.

« Dans le Nabarima, il y a 1.800.000 barils. Cela tient dans deux pétroliers de moyenne capacité. La position devrait être de les retirer du Nabarima et de les placer dans un pétrolier sûr qui peut se trouver dans la mer vénézuélienne », a précisé Eudis Girót, le directeur exécutif de la Fédération unitaire des travailleurs du pétrole du Venezuela (Futpv).
En décembre 2019, les États-Unis avaient déjà imposé des sanctions supplémentaires sur le navire Icaro lui-même pour avoir livré des produits pétroliers vénézuéliens à Cuba, l’un des principaux alliés du président Nicolas Maduro à l’étranger. L’Icaro est donc l’un des pétroliers soumis aux sanctions américaines imposées au Venezuela. Mais les responsables de l’ambassade des États-Unis à Port-of-Spain ont déclaré que les sanctions n’empêchent pas l’inspection et l’assistance au navire, car elles ne visent pas « des questions de sécurité, d’environnement ou de préoccupations humanitaires ».

Avant de préciser : « Nous soutenons fermement les actions immédiates visant à mettre le Nabarima en conformité avec les normes de sécurité internationales et à éviter d’éventuels dommages environnementaux, qui pourraient avoir un impact négatif non seulement sur la population vénézuélienne mais aussi sur celle des pays voisins. Le PDVSA a la responsabilité de prendre des mesures pour éviter une catastrophe environnementale dans les eaux vénézuéliennes ».



Ces déclarations surviennent alors que l’on s’inquiète de plus en plus d’une éventuelle catastrophe écologique si les millions de gallons de pétrole stockés à bord du Nabarima se déversaient dans le golfe de Paria.

>> Une pétition est en ligne                 

       


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