Trestles : (re)découvrez l’histoire du spot !

Profitez du fait que les Rip Curl WSL finals soient une nouvelle fois off pour la journée pour en apprendre plus sur le mythique spot californien.

13/09/2021 par Surf Session

Ici, pas de jetée de 500 mètres de long comme à Huntington ni de tribunes XXL, pas plus que de festival de musique sur la plage ou de compétition de skate et de foire aux touristes. Trestles demeure un des sanctuaires du surf californien, situé dans un parc naturel protégé.
Revisitons nos classiques à propos de cette petite bande de terre de San Clemente alors que les Rip Curl WSL finals, une nouvelle fois off pour la journée, devraient se tenir demain soir. 

Plus que d’histoire, Trestles est avant tout une affaire d’histoire-géo.

Car Trestles ce n’est pas un spot mais une batterie de spots étalés sur un peu moins de 2 km au sein du San Onofre State Park. Du nord au sud, on trouve Cottons, Uppers, Lowers, Middles et Church. Les houles du Pacifique viennent lécher ce bandeau de littoral et semblent former (à tort) une succession de pointbreaks de droite, même si les gauches, plus courtes, sont aussi de la partie. Faciles, longues, les vagues de Trestles font la part belle aux manoeuvres avec une face malléable qui permet de balancer à peu près tout ce que compte le répertoire du surf moderne.

Mais avant de goûter aux murs de Trestles, un peu de marche s’impose. Dans un pays où la voiture est reine et la place de parking un droit absolu, Trestles fait figure d’exception puisqu’ici il faut se taper un quart d’heure de marche depuis la Coast Highway (après s’être garé où l’on peut près du célèbre restau Carl’ Jr). La procession passe sous le pont de chemin de fer qui vient troubler la quiétude de l’endroit, alors que ce segment de Californie est le second en termes de trafic sur l’ensemble des États-Unis. Avec 45 passages par jours, ils sont près de 3 millions de voyageurs potentiellement capables de vous faire le surf report en passant devant l’endroit ! C’est d’ailleurs ce pont, originellement construit en bois, qui donna son nom à l’endroit, le terme « trestle » désignant un pont sur chevalets.

SAN O’, NIXON ET LES MARINES

Dans la grande histoire du surf aux États-Unis, ce n’est pas Trestles qui a fait parler de lui en premier, mais San Onofre, tout juste deux kilomètres plus au sud de Church. Surfé dès les années 20, l’endroit connaît une forte fréquentation à partir de 1942, alors que le camp de Marines de Pendleton voit le jour ici-même. Mais c’est le chef suprême des armées qui va donner sa renommée à Trestles, alors que le président des États-Unis Richard Nixon décide de faire de l’endroit sa résidence d’été. Dès l’année de son élection en 1969, Nixon fait acheter une belle demeure en face du spot de Cottons, que lui et les Américains connaîtront sous le nom de Casa Pacifica. Sécurité oblige, toute la zone est alors interdite de circulation et les surfeurs se voient priver des vagues de Trestles pendant une dizaine d’années, rajoutant un caractère mythique à ces spots.

Mais parmi les conseillers de Nixon, on trouve des membres du San Onofre Surf Club et ceux-ci parviennent à le convaincre de réouvrir l’accès aux surfeurs. Mieux, Trestles devient un parc national.

ENTRE L’AUTOROUTE ET UNE CENTRALE NUCLÉAIRE

Si Trestles est protégé au sens législatif, la zone n’en est pas moins menacée. Depuis la fin des années 60, la centrale nucléaire de San Onofre, à même la plage, a été un grand sujet de controverses à l’échelle nationale et notamment pour le choix de l’emplacement en pleine région de forte activité sismique (oui, comme à Fukushima…). Arrêtés depuis janvier 2012, les réacteurs nucléaires seront démantelés, mais la verrue et le danger seront bien présents pour des décennies à venir.

Aujourd’hui, ce ne sont plus la friction des atomes qui menace directement Trestles mais les autos. Sur cette section de littoral extrêmement fréquentée, un projet d’autoroute payant à 6 voies prévoit de traverser le State Park. Soutenue par des intérêts privés très puissants, cette autoroute est pour l’instant en stand-by grâce notamment à l’équivalent californien de notre Conservatoire du Littoral, qui a refusé d’accorder un permis pour le chantier. Mais si en novembre 2016 on pensait l’idée d’une autoroute abandonnée, le projet a subit début juillet 2017 un revirement de situation. La municipalité, soutenue par des lobbying, espèrait contrecarrer un accord de protection du site signé en novembre. L’idée d’une route payante à travers le parc est relancée. 

En septembre 2020, on apprenait que Trestles était définitivement sauvé.

L’AVÈNEMENT DES PROS

Si la première compétition organisée à Trestles remonte à 1977, le lieu ne se prête a priori pas vraiment à des événements d’envergure : accès compliqué, pas d’infrastructures en dur, législation environnementale draconienne… Sauf que, à la fin des années 90, le monde du surf pro prend un virage, organisant désormais davantage des compétitions pour qu’elle soient vues à la télé, puis sur le web. Ces événements plus médiatiques que populaires reviennent par la même occasion vers les racines du surf, privilégiant la qualité des vagues et l’invitation au voyage. Paradoxalement, Trestles possède toutes ces caractéristiques, véritable enclave dans une région qui connaît pourtant le plus gros taux de surfeurs au mètre carré.

Ainsi en 2000, un premier Billabong Pro voit le jour à Trestles, remporté par un certain Andy Irons. Ce retour aurait très bien pu être de courte durée, alors que l’épreuve fut annulée l’année suivante après que les attentats du 11 septembre venaient de frapper l’Amérique, quelques jours seulement avant le lancement de la compétition. Mais de 2002 à 2008, Trestles accueille de nouveau des manches du WCT, sous la houlette d’un sponsor issu de la téléphonie, devenant le Boost Mobile Pro.

CHAUVE QUI PEUT


Formée par d’anciens de Billabong USA en 1999, la jeune marque Hurley a besoin d’un porte-étendard au niveau sportif et mise sur cette étape américaine pour forger son image, alors que les majors du surf business zyeutent davantage vers des destinations exotiques pour ce qui ne s’appelle pas encore le « dream tour ». Au passage, Bob Hurley tient sa petite revanche sur le Billabong Pro Trestles…

Dès la première édition du Hurley Pro en 2009, la compétition démarre sous de bons auspices et jouit du prestige de la victoire de Kelly Slater. Pour le rookie du WCT, Jérémy Flores, il s’agissait aussi du premier gros résultat de sa carrière, avec une troisième place. On prend les mêmes et on recommence l’année suivante : nouvelle victoire de King Kelly et nouveau podium pour Florès. Décidément, l’épreuve réussit aux Frenchies, puisqu’en 2009, c’est au tour de Michel Bourez d’atteindre les quarts de finale pour sa première saison parmi l’élite, battu par le futur vainqueur Mick Fanning, alors en route vers son second titre de champion du monde.

Mais le maître incontesté de Trestles se nomme bel et bien Kelly Slater, s’imposant de nouveau en 2010, 2011 et 2012 : la 50e victoire de sa carrière et la 6ème à Trestles ! Et que dire de cet aérial impressionnant réalisé par Kelly en 2015 ! Malheureusement, l’Américain ne sera pas présent cette année, lui qui souffre toujours d’une sérieuse blessure à la cheville

Il ne sera malheureusement pas là demain soir sur ce spot qui couronnera les nouveaux champions du monde 2021.

                 


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3 commentaires

  • Djogai
    13 septembre 2014 19h02

    Super article en revanche la 50èmes victoire du king ce n’était pas au pro france de 2012 face dane reynolds?

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  • guy
    14 septembre 2013 10h12

    bel article! voilà de la qualité!
    chapeau bas!
    poursuivez ainsi!

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  • neurone
    13 septembre 2013 14h55

    Les attentats du 9 septembre??? Sinon, sympa récapitulatif historique de ce spot qui m’a appris des choses. Merci.

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