Surface : Ben Thouard devant l’objectif

Pour une fois, le photographe se retrouve devant l'objectif pour raconter son parcours.

14/06/2018 par Noémie Le Page Dronval

Après la sortie de Surface, son premier livre, le
photographe français 
Ben Thouard revient sur son parcours avec un film du même nom. Basé à Tahiti, collaborateur régulier de Surf Session, il nous offre une perspective unique sur l’océan. Un milieu hostile, rebelle et sauvage qu’il parvient à shooter de mille façons grâce à cet immense amour pour la surface et tout ce qui se passe autour. Sous son oeil, les vagues se retrouvent mises à nues. À l’occasion de la sortie de ce court biopic, on vous laisse (re)découvrir l’interview réalisée dans notre magazine du mois de mai, qui accompagnait un portfolio exclusif. Plongez avec l’un des photographes les plus talentueux de sa
génération
, dans son univers sous-marin

 

Pourquoi avoir choisi le titre Surface pour ton
livre ?
C’est le sujet principal de toutes mes photos, là où tout se
joue pour moi, là ou je passe la plus grande partie de mon temps. La surface
est sculptée par la houle pour donner naissance aux vagues. Elle
prend des formes uniques, enfile des robes différentes à chaque heure,
offre des jeux de lumières et de textures infinies. Sous l’eau, elle
s’efface parfois, durant une fraction de seconde et laisse entrevoir
notre monde. Elle devient un parfait miroir et nous donne la sensation d’évoluer
dans une bulle géante ! C est plus que le titre de mon livre, c’est
un concept visuel sur lequel je travaille depuis des années.

Qu’est-ce qui t’inspire le plus ?
Un peu de tout ! L’inspiration a évolué avec le temps. Ça a
d’abord été les surfeurs, puis les vagues et, depuis deux ans, le monde
sous-marin. Mais le monde du surf ou les vagues m’inspirent toujours autant ! J’y
ai trouvé des points communs et cette inspiration est une suite logique de ma
recherche photographique. Depuis ma première année à Tahiti en 2007, j’ai
été époustouflé par la clarté de l’eau et j’ai tout de suite
(comme beaucoup de photographes) commencé à shooter des images
sous-marines de surf. Plus de la moitié de mon livre est consacrée au monde
sous-marin. J’ai trouvé dans le monde du surf, des vagues et sous-marin
une source d’inspiration infinie. Ce livre représente une petite
interprétation de ma vision.

 

Que voulais-tu montrer dans ce livre ?
Ma propre vision de l’océan et faire en sorte que le fil
conducteur de la surface ressorte bien. Ce n’est pas juste un livre reprenant
mes meilleures images de ces dix dernières années passées à Tahiti. Oui,
il y a quelques unes de mes meilleures images, mais pour une bonne raison, pour
une sensation particulière qu’elles évoquent, pas juste parce que c’est une
bonne image de surf. Je voulais montrer quelque chose de nouveau, de
personnel, de jamais vu, qu’on ne peut sans doute voir qu’à Tahiti, pas faire
un livre de photos de surf ou de photos de Teahupo’o. C’est mon interprétation
de l’océan. Il y a du surf mais très peu et pour une bonne raison. Il y a
des vagues mais aussi des photos simples de l’océan, pleines de caractère…
Il y a de tout autour de la surface.

Comment as-tu mené à bien ce projet ?

Je ne compte plus les heures pour ce livre ! C’est au
minimum trois ans d’acharnement photographique après sept ans d’expérience
à Tahiti.
En 2015, j’ai
décidé d’entreprendre ce projet pour plusieurs raisons.
Parce que faire un livre était
quelque chose que je tenais absolument à faire dans ma carrière. Et aussi
parce que je me suis ouvert à un autre type d’images dans la
photo. J’ai commencé à développer mon style, shooter autre
chose, vendre pas mal de print, c était un peu la suite logique.
J’ai choisi de m’orienter vers un côté
beaucoup plus artistique et j’avais envie de créer des images qui restent,
qu’on ne zappe pas d’un coup de pouce sur Instagram.
Du coup, en 2015, je commence ce projet, je fais le point
sur ce que j’ai comme images, je réfléchis à ce que je veux montrer, un concept… Et
là commence l’acharnement !
Je ne rate plus aucun créneau, j’explore de nouveaux spots,
de nouvelles façons de shooter. Surtout, je développe mon style et je
garde pour moi ou pour mon livre mes meilleures images !
Je choisis de ne rien dévoiler
dans les magazines, les blogs ou sur les réseaux sociaux pour garder
l’impact des ces images pour mon livre.
Je shoote du surf, des vagues, le monde sous-marin sous un autre
angle.
Je redécouvre le
monde sous-marin et choisis d’en faire le fil conducteur de mon livre.
Je teste différents
matériels, travaille sur un style de post-production qui m’est propre.
Je passe des journées entière
sous la surface à Teahupo’o, parfois de 7 h à 17 h dans l’eau sans pause.
J’attends parfois pendant
des semaines ou des mois les conditions parfaites, le rayon de
lumière, une vague qui casse, ces instants magiques où toutes
les conditions sont réunies.

C’est rare, ça ne se présente qu’une fois et il ne faut pas les
rater.
Ces images, ce ne
sont pas juste quelques images prises à la volée lors de shoot de surf le
matin à Teahupo’o, elles sont le résultat d’une recherche immense et d’une réflexion
murie sur l’océan.
Ce livre est donc
une délivrance pour moi !
Ça fait aussi un an que j’enchaîne les voyages à Paris pour
chercher un éditeur, des sponsors, un imprimeur, des partenaires,
des gens qui croient en mon projet.
Je réalise en septembre dernier que la seule façon de faire un
projet qui colle à ma vision est de le faire tout seul.
Alors, après avoir réunies les 200 photos que je
voulais inclure dans ce livre, choisi mon titre, le format, j’ai cherché
des sponsors et j’ai reçu beaucoup d’attention.
Canon, Aquatech, Air Tahiti Nui,
The Explorers m’ont tout de suite suivi en voyant les images. J’ai
reçu beaucoup d’encouragements de la part de collègues de travail
(dont Surf Session) pour réaliser ce livre.
Même si ce n’était pas mon envie de départ, je me
suis lancé dans l’auto-édition et ce long processus d’imbriquer
les images les unes avec les autres et de réaliser une mise en page cohérente.
Je n’étais pas tout seul, plusieurs personnes m’ont aidé dont Matt Georges et
Greg Gyselinck, avec qui j’ai travaillé sur la maquette.
J’avais l’impression de ne jamais
arriver au bout.
J’ai adoré même si
c’était plus de travail que je ne l’avais imaginé ! Bref le voici,
mon troisième enfant arrive !

Tu penses tes photos en amont ou tu te laisses
surprendre sur le moment ?
Les deux ! Je les pense surtout en amont mais il
y toujours une part de surprise. Et c’est ça qui est top, on découvre,
on innove et on est surpris. Je les rate parfois, ça me travaille pendant
des semaines, jusqu’à ce que je puisse finalement les
capturer. Ça m’arrive de penser à des photos pendant des semaines
pour finalement les capturer des mois plus tard ou me rendre compte que
c’est impossible. C est une longue recherche pleine de surprise.

 

Niveau matériel, qu’est-ce que tu as principalement
utilisé pour les photos de ce livre ?
Toutes les photos de ce livre ont été réalisées à la nage avec
des caisson Aquatech. Le caisson étanche est donc mon outil n°1.
Ensuite, comme boitier, j’ai utilisé un Canon 1DX mII et un Canon 5DSR qui
sont mes boitiers principaux. Comme optique, il y vraiment eu de tout, du
fisheye, du très grand angle, du téléobjectif, de l’optique fixe, du
zoom… Mon combo favori serait le Canon EOS 1DxmII avec un 24 mm
1,4 dans un caisson Aquatech Delphin.

 

À quel point Tahiti est un endroit de rêve pour
shooter ?
Tahiti m’a ouvert les yeux sur le monde sous-marin et je
n’aurais jamais pu réaliser ces images ailleurs ! L’eau y
est tellement claire, c est hallucinant ! À une certaine heure, quand
l’eau est claire, on a l’impression d’être sous l’eau comme dans l’air ! Je
ne m’en lasserai jamais.

             

    


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