[best of] Récit de trip : 7 jours en Norvège des fjords

Le surf au-delà des vagues. New Colors.

27/12/2023 par Maia Galot

Roxy New Colors Norvège Conradi Veselko Grospiron Gonzalez
De gauche à droite, Kika Veselko, Zoé Grospiron, Janire Gonzalez et Hina Conradi © Monsen/Bundschuh pour Roxy/Surfeuses Magazine
Péninsule de Stadt © Monsen/Bundschuh pour Roxy/Surfeuses Magazine

Novembre 2022. On est en Norvège avec quatre surfeuses junior du team Roxy pour un trip free-surf en eaux froides. Francisca Veselko, Janire Gonzalez, Hina Conradi et Zoé Grospiron sont du voyage. Le programme est alléchant, la destination attrayante et le niveau bien en place avec notamment dans le groupe la championne d’Europe Junior WSL 2022 (la Basque Janire), la championne du Monde Junior 2022 et surfeuse des Challenger Series (la Portugaise Kika), l’une des meilleures françaises de sa génération, qui développe un goût prononcé pour le surf de taille (la Réunionnaise Hina) et une longboardeuse pensionnaire du tour mondial WSL (Zoé bien-sûr). Toutes sont ravies de participer à cette aventure, menée de front par Surfeuses Magazine et Roxy, leur sponsor. 

À l’esprit, elles ont notamment de belles vagues et de la neige, pour qu’aucun doute ne subsiste quant à la température de l’eau. Aucune d’entre elles n’a de réelle expérience en eaux froides, si ce n’est en compétition dans le sud de l’Angleterre (qui on vous l’accorde est déjà un pas en terme d’épaisseur de néoprène nécessaire). Pour ce trip, elles ont chacune dans leur boardbag plusieurs planches, mais aussi deux combinaisons 5/4/3mm, des chaussons et des gants 3mm.

Petit problème à l’arrivée :  tout est là, sauf les vagues. Cela fait partie intégrante des aléas du voyage, et même les prévisions peuvent être trompeuses. Malgré des lignes existantes sur les cartes, la houle n’entre pas dans la baie d’Ervik, le spot repéré en amont comme le meilleur de la région. Nous sommes dans la région des fjords, au Sud-Ouest du pays, sur la péninsule de Stadt. La zone est pourtant réputée pour le surf norvégien et nombre de membres de la communauté locale y ont déménagé spécialement pour pratiquer toute l’année. Pourtant, les spots se montrent capricieux. La plupart des peaks sont des beachbreaks au cœur des baies de la côte escarpée, ce qui signifie qu’ils demandent une houle d’une orientation bien particulière, combinée à une période suffisante et bien sûr en prenant en compte la marée. Pour couronner le tout, les jours ont déjà visiblement raccourci dans le pays nordique ! Les premières lueurs se dessinent à 8h30 pour un lever de soleil à 9h, tandis que le coucher de soleil a lieu dès 15h30. L’étau se resserre vite sur les sessions de surf, surtout pour des surfeuses pro qui idéalement enchaînent les sessions dans la journée. 

Pas de surf donc, mais du temps pour l’exploration. De la petite vallée coincée entre les hautes collines au sommet de Vestkapp, le point le plus à l’ouest de la Norvège occidentale, en passant par des lacs au reflet digne d’un miroir fraîchement nettoyé et des routes sinueuses entourées de verdures, la Norvège nous en met plein les yeux. Le soleil, jamais très haut dans le ciel, souligne les fjords et les montagnes au loin, découvrant chaque relief et des couleurs contrastées. C’est sans nul doute un paradis pour les créatifs et tous les métiers où l’image est reine, car le lieu inspire et nourrit l’esprit par sa superbe. On en oublierait presque que personne n’a encore touché l’eau salée. Dans un cadre hors-pair, les surfeuses redécouvrent le plaisir du voyage :  découvrir de nouvelles vues, rencontrer de nouvelles personnes et profiter du temps qui passe, à la fois vite et calmement.

La première session de surf aura lieu le troisième jour du trip. Les filles sont impatientes de se mettre à l’eau, bien que les conditions semblent encore petites. C’est Hina qui prendra la première vague du trip, tandis que Zoé parviendra à tirer son épingle du jeu avec son longboard dans cette taille. À la sortie de l’eau, toutes ne peuvent articuler qu’un mot : « froid ». Après une heure à l’eau, elles ont les mains et les pieds frigorifiés, que seule une bonne douche pourra réanimer. En binômes méthodiquement organisés, elles sautent en combinaison dans la voiture pour se précipiter en l’état sous l’eau chaude de la surf house quelques centaines de mètres plus haut. Plus tard en échangeant avec les locaux, on comprendra pourquoi : « je ne peux pas croire que vous avez vos chaussons d’été ! » nous dit l’un d’entre eux. Ok, donc 3mm c’est en fait le matériel d’été par ici. À cette période, les surfeurs sont en gants et chaussons 5mm, voir en 7mm pour certains. On se demande tout de même comment sentir la board et trouver ses sensations sous tant de néoprène mais on comprend vite que là n’est pas le cœur du sujet. En Norvège, on surfe pour le plaisir de l’eau, le plaisir de la glisse et la culture du surf avant de surfer pour la performance. Ici personne n’a de niveau international (pour le moment du moins) et pourtant tous sont à l’eau, par toutes les conditions et avec un plaisir contagieux.

Les sessions se succéderont sur le spot d’Ervik, dans une forme de challenge que nous n’avions pas vu venir. Nous voulions pousser les jeunes pros dans des conditions solides et froides. Si le froid était au rendez-vous, la taille n’est jamais réellement rentrée. En revanche, le challenge était présent sur le spot qui s’est montré particulièrement capricieux. En effet, le banc de sable malmené par les tempêtes des semaines précédentes forme une vague esthétique mais bien trop rapide : on ne compte plus réellement les close-outs. Il est difficile pour les Roxy girls de trouver une succession de sections à manœuvres, tandis que leur technique sur le re-entry sera bel et bien celle qu’on aura eu tout le loisir d’observer. 

Zoé Grospiron Norvège new Colors roxy
Zoé Grospiron devant un lever de soleil hors du temps © Monsen/Bundschuh pour Roxy/Surfeuses Magazine
Janire Gonzalez Norvège New Colors Roxy
Janire Gonzalez © Monsen/Bundschuh pour Roxy/Surfeuses Magazine
Kika Veselko Norvège New Colors roxy
Kika Veselko © Monsen/Bundschuh pour Roxy/Surfeuses Magazine
Hina Conradi Norvège new Colors roxy
Hina Conradi © Monsen/Bundschuh pour Roxy/Surfeuses Magazine
Zoé Grospiron Norvège new Colors roxy
Zoé Grospiron © Monsen/Bundschuh pour Roxy/Surfeuses Magazine

Les bonnes vagues se faisant désirer, la meilleure option depuis le bord semble être de prendre son mal en patience et d’attendre l’Opportunité. Une gauche au Sud de la baie (formée par l’épave d’un navire datant de la seconde guerre mondiale) nous fait notamment de l’œil depuis le trépied de la caméra, bien qu’il faille attendre dix minutes ou plus pour la voir fonctionner sur trois vagues maximum. À l’eau c’est pourtant une autre histoire : « il fait trop froid pour rester en place, on a qu’une envie c’est de ramer pour se réchauffer » nous explique Hina, dont les propos sont confirmés par ses pairs. Bien qu’on ne soit pas encore dans la neige à cette période de l’année, l’hostilité des éléments est donc bien présente, surtout lors de la seconde moitié du trip, où la température extérieure sera ressentie en négatif (-3°C et du vent). Poussées dans leur engagement mental, les surfeuses exploitent au mieux la zone, espérant à chaque fois trouver l’occasion de scorer le spot. 

D’une session à la suivante, les émotions fluctuent, passant de la frustration à la gratitude. Car malgré les conditions compliquées, le plaisir du moment prend à chaque fois le dessus. En Norvège, le team n’aura pas trouvé les vagues de sa vie. Pourtant, nous repartons avec une panoplie de moments partagés, de couleurs imprimées dans nos souvenirs et alors qu’il y a une première à tout, celle-ci aura été la leur. 


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