Nathan Sadoun :  »Je sais désormais que j’en suis capable »

Entretien avec celui qui, à 19 ans seulement, se fait un nom dans le longboard classique.

06/06/2018 par Marc-Antoine Guet

Il n’a que 19 ans mais le jeune longboardeur français vient de mettre un pied dans la cour des grands. Originaire de Marseille, Nathan Sadoun a participé pour la première fois de sa vie au Vans Duct Tape Festival organisé par Joel Tudor à Zarautz, il y a une quinzaine de jours. Au milieu des Tyler Warren, Alex Knost, Ryan Burch and co, le jeune français a vécu son rêve les yeux grands ouverts. Etudiant à l’INSA Lyon dans une classe de sportifs de haut niveau, Nathan revient pour nous sur ce moment précieux et aborde, non sans une certaine maturité, la différence entre le longboard moderne et le longboard classique. Parfait, alors que la Belza Classic et le longboard Pro Biarritz démarrent dans quelques jours. 
Comment réagit-on quand on apprend que l’on est invité au Vans Duct Tape Festival ?
J’ai reçu l’invitation un mois avant la Duct Tape. C’était mon rêve depuis tout petit. Depuis que j’ai commencé à faire du longboard classique en fait. Je ne vois pas de compétition de longboard classique qui soit plus prestigieuse que celle-là. Tout simplement parce que c’est Joel Tudor qui l’organise avec Vans, une marque qui fait rêver dans le monde du freesurf. À la maison, je n’ai pas de superbes vagues donc j’ai toujours été habitué à surfer avec tout type de planche pour en profiter au mieux. J’ai découvert le longboard classique à Salinas, en 2011, et j’ai un eu vrai coup de foudre. À la maison, j’ai ainsi pu prendre beaucoup plus de vagues, ça glissait bien mieux. Et j’ai vu par la suite qu’il y avait des compétitions de longboard classique en Europe sur le modèle de la Duct Tape.

Comment est-on sélectionné pour y participer ?
Il n’y a pas de sélection, il n’y a aucun critère. Il y a des opportunités, c’est tout. Moi, j’avais décidé d’être présent sur beaucoup de compétitions de ce style pour rencontrer ce genre de personnes et apprendre à leur coté.


Cette invitation arrive très tôt dans ta carrière. Comment aller voir plus loin ? 
J’ai clairement envie de revenir aussi souvent que je peux. Jusqu’à présent, j’ai toujours dû prouver sur chaque compet’ que je valais quelque chose. Je voulais faire la Duct Tape donc je devais prouver que je pouvais être ici. Maintenant, je vais pouvoir être plus serein sur les autres compétitions. Je sais désormais que j’en suis capable. C’est un gros plus pour la confiance. Faire la Duct Tape m’a libéré en quelque sorte d’un poids que je m’étais mis. C’est la fin d’un chapitre et le début d’un autre désormais. Je voulais aller au bout maintenant c’est fait (rires). »

Te retrouver à côté d’Alex Knost, Ryan Burch ou Tyler Warren dans l’eau à 19 ans, ça te fait quoi ? 
Je les ai toujours vu comme mes idoles. Je regarde encore tous les jours leurs vidéos et j’ai appris à surfer avec eux en les regardant. Mais, au final, quand tu es dans l’eau et que tu discutes avec eux ils sont assez simples, ouverts et sympas. Ils ont plein de choses à raconter sur le surf, ils sont pros contrairement à moi, c’est leur vie. Moi, c’est juste ma passion donc j’avale tout ce qu’ils peuvent me dire. Après, dans l’eau, il faut essayer d’agir comme si ce n’était pas mes idoles. Mais être invité, c’est déjà une énorme victoire.
Il y a la compet’ et aussi les sessions de free surf en dehors des compétitions. À chaque fois que je fais un voyage et que je rencontre des gens comme ça, tout de suite, je passe un palier dans mon niveau en surf et je comprends plus de choses. Ils sont tellement sur une autre planète que tu ne peux que progresser. 


Pourquoi n’y a t-il pas de fille cette année ? 
Normalement, il y a toujours une fille ou deux. Mais je pense que, depuis quelques temps, le niveau devient très élevé chez les filles. C’est difficile d’en choisir qu’une ou deux donc Joel Tudor a décidé d’organiser à l’avenir une compétition spéciale filles. Il l’a annoncé sur Instagram. De mémoire, ça sera cet été. Elles méritent largement leur propre event comme on a le nôtre.

Ça représente quoi le longboard pour toi ? 
Beaucoup de temps et beaucoup de sentiments. Du haut de mes 19 ans, j’ai quand même passé 10 ans de ma vie à faire du longboard. Si je fais des études, c’est pour pouvoir surfer grâce au métier que je ferai. Contrairement à ceux qui passent leur vie sur la plage et qui se dise « je verrai après », que je ne dénigre pas du tout d’ailleurs, je respecte leur choix, moi, je préfère vivre d’un métier qui me plaît et tout investir dans le surf plus tard. Je suis quelqu’un d’hyperactif et le longboard m’aide à me calmer.

Comment expliquer la différence entre le longboard classique et le longboard moderne ?
C’est complètement différent. L’objectif quand tu surfes en classique ou en moderne est complètement différent. Pour moi, le longboard moderne, c’est du shortboard sur une longue planche et tu rajoutes épisodiquement des noses. Alors que l’on fait du longboard classique pour compléter le shortboard. L’état d’esprit, les manœuvres, la pratique sont différents. Et il y a une énorme différence sur les planches. Le longboard moderne, ce sont des planches qui vont ressembler comme deux gouttes d’eau à un shortboard mais en plus long. Il y a  beaucoup de rocker, c’est assez fin et très léger. Un longboard moderne de compétiteur, c’est presque aussi léger qu’un shortboard. Et les rails sont des rails de shortboard. 
À l’opposé, le longboard classique propose des planches avec des shapes qui n’ont pas beaucoup évolué depuis les années 60. Même s’il y a eu des modernisations, les planches sont plus plates, avec moins de rocker. Elles ont un seul aileron, c’est la spécificité de la discipline, et les planches sont beaucoup plus lourdes. Les figures sont différentes également.


Dans le longboard moderne, dans la majorité des cas, tu vas pomper pour prendre de la vitesse comme sur un shortboard  En classique, tu vas jouer sur la balance. Avancer sur la planche par exemple pour prendre de la vitesse. Tu vas vraiment jouer sur l’inertie, beaucoup plus qu’un longboard moderne. En ce qui concerne les manoeuvres, il y a plus de noseriding en longboard classique. Les turns sont différents aussi. Tu ne vas pas faire un cut-back roundhouse que tu vas carver pour taper ton re-entry sur la mouse.
En longboard classique, tu fais tes turns plus avec l’arrière du corps. Tu vas essayer de lier toutes les manœuvres entre elles. L’objectif, c’est qu’il n’y ait aucune cassure du take-off jusqu’au kick-out. Par exemple, on aime beaucoup, sur une droite, partir en gauche avant de revenir dans le bon sens. Ou inversement. En classique, tu vas plus doucement sur l’avant de ta planche, tu peux faire une dizaine de pas croisés, même si j’exagère un peu ! Mais l’objectif ne va pas être de courir sur le nose et d’y arriver vite mais de soigner la manière d’y arriver.


Quelle serait la vague parfaite pour du longboard classique ? 
Ça va dépendre des personnes. En Californie, par exemple, je trouve que c’est des vagues plutôt lentes, mis à part quelques pointbreaks comme Malibu. Il va donc y avoir beaucoup de noseride et de tricotage. En Australie, c’est complètement différend. Le mur est tendu de A à Z il faut donc que tu aies toujours de la vitesse. Donc, ça va dépendre du style de planche que tu as et de ton propre style. Mais ça ne sera jamais des grosses vagues. Donc, je dirais une vague pas trop grande, avec un bon mur qui te permet d’être sur le nose un long moment et de pouvoir accélérer sur le nose.

C’est plus facile de surfer un longboard en single ou en 2 + 1 ? 
Ça dépend des vagues mais sur des vagues à longboard, je pense que c’est plus facile avec un longboard classique. Tu peux plus prendre ton temps. Alors qu’un longboard moderne, c’est comme en shortboard, tu dois être à fond du début à la fin.

Un nose en longboard ou un tube en shortboard ? 
(Rires) Je ne veux pas choisir. C’est justement ce qui caractérise notre style. On ne choisit pas et on fait les deux ».

Photo à la une : Nil Puissant

    


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