Jade Magnien, la tête sur les épaules

"Pour moi le surf c'était travailler, travailler et travailler. J'ai compris que ça ne marchait absolument pas comme ça".

06/05/2020 par Maia Galot

Jade Magnien WSL
Cabreiro Pro Zarautz Basque Country 2019 © WSL / Poullenot
Jade Magnien Arnaud Darrigade
Le binôme a développé une relation coach-surfeuse efficace.

Bien qu’elle soit née en Vendée, Jade Magnien est une Landaise pure souche. La surfeuse de 17 ans vit à Hossegor depuis qu’elle a un an. C’est là qu’elle a appris à surfer. Son père, surfeur, lui transmet sa passion dès leur arrivée dans les Landes, « à 2 ans j’étais sur la planche avec mes brassards« . Et les choses s’enchaînent. 

Une passion qui se partage

Piquée à son tour, Jade s’inscrit dès son enfance au club de surf de Capbreton. Elle y prend des cours avec Arnaud Darrigade. Celui qui lui a appris à surfer est aujourd’hui son entraîneur. Jade et Arnaud travaillent en binôme depuis plus de 10 ans. « Il sait comment me gérer car il me connaît depuis que je suis toute petite. En compétition je stresse et il a les mots justes pour me faire redescendre avant ma série et pour me motiver davantage« .

Leur travail ensemble, c’est aussi beaucoup d’entraînements à l’année, un rythme que Jade a vite intégré. Et c’est finalement en free surf qu’elle a besoin d’être poussée : « j’ai plus de mal car j’ai toujours été focalisée sur les entraînements« . Le duo cale donc les entraînements en fonction des conditions, puis Jade repart en free surf pour « s’éclater et prendre du plaisir« . La surfeuse a dû rééquilibrer son approche du surf : « Pour moi c’était travailler, travailler, travailler, et j’ai compris que ça ne marchait absolument pas comme ça« . La reprise du free surf lui a permis de retrouver de bons résultats à l’eau, et l’adolescente a retenu la leçon. « Il ne faut surtout pas oublier la sensation de plaisir, c’est le plus important. En compétition on veut tellement bien faire qu’on oublie l’essentiel. C’est pourtant quand tu te fais plaisir que tu scores ». 

En période d’entraînement, elle travaille aussi l’aspect tactique. S’ils sont plusieurs à l’eau, ils appliquent notamment le système de priorité, pour s’y habituer et l’intégrer. Sur ce point, la routine fait effet : « au début ça a été compliqué car il faut beaucoup réfléchir, mais avec l’expérience tu sais les erreurs à ne pas refaire« .

Des brassards aux compétitions

La résidente de Capbreton s’est mise au shortboard instinctivement. C’est dans cette discipline qu’elle retrouve les sensations de glisse et de communion avec la nature qui lui plaisent. « La manoeuvre se fait plus rapidement, la sensation de glisse sur la vague… C’est elle (la vague, ndlr) qui te fait ressentir des sensations incroyables. Tu sens que quelque chose te pousse, tu es avec la nature et tu fais le sport que tu aimes grâce à elle« . La compétition a aussi rapidement fait partie de la vie de Jade. La surfeuse commence par les « petites compétitions du club« , puis le Pitchoun tour… « C’est un endroit où je retrouvais mes copains et mes copines, même en compétition c’était toujours fun, l’ambiance était géniale » explique-t-elle.

Elle évolue aujourd’hui sur le tour Pro Junior et les Qualifying Series de la WSL. « Ça m’a plu car je suis très compétitrice« . Jade découvre peu à peu le sentiment de victoire (addictif on est d’accord) mais aussi les leçons que l’on tire des défaites : « c’est là que tu apprends le plus, je pense que ça me servira dans la vie même en dehors du surf« . Encore en début de carrière, ses moments marquants se déclinent sur plusieurs années. Jade se souvient particulièrement de sa victoire au championnat d’Aquitaine à Lacanau, devant son père et son coach en 2015. « J’ai eu une sensation extraordinaire et c’est là que j’ai compris peu à peu que j’aimais la compétition, que je voulais continuer« . 

Suivront d’autres moments importants, comme sa sélection en section surf au collège Jean Rostand. La jeune surfeuse est alors la seule fille sélectionnée au milieu des garçons de son âge et en tirera un enseignement qui la mettra en confiance : « c’était cool de pouvoir s’imposer au milieu des garçons, ça m’a permis de me dire : les garçons font ça et je peux le faire aussi« .

L’année 2019 marque sa dernière année sur le tour Pro Junior. Tour que la surfeuse n’approche pas de la même manière que le QS. « Je me mets plus la pression sur les Pro Junior, car sur les QS les concurrentes sont plus âgées que moi donc j’ai moins de stress« . De ce fait, ses objectifs varient. En Pro Junior, elle vise le top 10. Sur le QS, il s’agit de « faire toujours mieux que l’année précédente ». En 2019 Jade était 128e du classement QS« cette année j’aurais aimé finir dans les 90/85« .  Les deux tours de compétitions se différencient aussi par leurs conditions : « sur le QS, si c’est tout petit et venté les organisateurs nous lanceront pas, alors que sur un Pro Junior ils peuvent nous lancer. C’est comme ça qu’on voit aussi qui sait surfer dans tout« .

Une opportunité de plus de se former avant d’entrer pour de bon dans la cour des grands.

La tête sur les épaules, le regard vers l’avant

S’il est plus difficile de se projeter en cette période, la pro garde le cap. Si Jade trépigne de retourner à l’eau, elle sait qu’il « faut faire avec« .

Faire avec selon Jade, c’est donc des entraînements physique à domicile, via des séances envoyées par son coach et ostéopathe Fred Verdier. Ensemble, ils se motivent à faire des séances via Facetime, pour garder le rythme. « II ne faut pas rester à rien faire » affirme la sportive. 

En parallèle, Jade continue ses études, avec cette année, le bac au programme. La lycéenne suit les cours du CNED. Le format n’est pas toujours simple, car les livres sont épais et la quantité de travail personnelle pas des moindres. Mais à nouveau la jeune fille n’y voit pas de réel problème : « c’est différent mais il faut s’adapter et on fait avec« .

Le « deal » avec ses parents, c’est de continuer les études en parallèle du surf, pour avoir « un back-up derrière » en cas de blessure ou si elle prend la décision d’arrêter. Bien que son mode de vie soit différent des jeunes filles de son âge, Jade garde les pieds sur terre, et prend des décisions réfléchies avec l’aide de ses proches.

« Cette année je passe mon bac, l’année prochaine je prends une année sabbatique pour faire le QS et travailler avec mes parents si besoin ». Agents commerciaux, les parents de Jade sont aussi propriétaires de la cabane de La Gravière, située au meilleur endroit pour checker le fameux peak d’Hossegor toute la journée.

Et après avoir travaillé, on peut aussi se faire plaisir : Jade voyage pour toucher à tous les types de vagues. Elle a passé 2 mois en Australie fin 2019, et va régulièrement à Bali en famille, où elle profite de l’ambiance détendue pour s’éclater en free surf. 

Elle garde un souvenir marqué de l’Australie, où elle a notamment visité la Gold Coast. La surfeuse y apprécie les réveils avant l’aube pour aller à l’eau avant de commencer la journée, la culture de surfer pendant des heures et quelques soient les conditions. « En début d’année je n’ai pas forcément fait de très bons résultats, mais j’ai beaucoup appris« . La passionnée y découvre aussi Newcastle, et les spots de Boomerang et Avocat.

« C’est vraiment un pays que j’adore« , raconte-t-elle. « Les vagues sont différentes. Elles sont plus molles, plus compliquées à surfer. Les Australiens s’entraînent dans toutes les conditions, ils vont à l’eau même si les vagues sont pourries. Mais c’est ce qui fait qu’ils sont bons en compétition !« 

Mais attention, malgré les voyages, la Landaise ne fait pas d’infidélité à son homespot ! « Pour moi, les meilleurs free surf que j’ai eu sont à la maison« . Ses sessions de free surf se font le plus souvent en solo car peu de filles surfent à son niveau sur Hossegor, mais le fun n’en est pas moins présent. 

La carrière de Jade prend peu à peu du grade. Riding Zone Junior lui dédiait d’ailleurs récemment un portait vidéo. Elle y embarque les caméras dans son quotidien, y présente son quiver (dont une toute nouvelle planche pour charger La Gravière à 3 mètres) et ses entraînements avec Arnaud.

Ce dernier la présente comme une jeune fille déterminée. « Par rapport aux filles de son âge, Jade a beaucoup d’engagement, elle n’a pas peur  » – on ne sera pas de ceux qui disent le contraire ! 

© WSL / Poullenot
Jade Magnien WSL
© WSL / Poullenot
https://www.instagram.com/p/B7JSGe3oGap

Mini portrait chinois 

Et si tu étais…

– Un animal ? Une loutre !

– Une ville ? Bah Hossegor !

– Un spot de surf ? La Gravière. 

– Une couleur ? Noir.

– Un plat ? Un couscous !

Jade Magnien WSL
© WSL / Masurel

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