Vies de surf, le dernier livre de Peyo Lizarazu

"Aucune nostalgie. Je ne m'inscris pas dans le c'était mieux avant, au contraire. Ça se veut être un témoignage de choses qui évoluent".

28/11/2022 par Marc-Antoine Guet

« Aucune nostalgie. Je ne m’inscris pas dans le c’était mieux avant, au contraire. Ça se veut être un témoignage de choses qui évoluent »

Nous sommes en fin de journée et le soleil s’apprête à se coucher sur les montagnes basques. L’été indien est encore là pour quelques heures mais il aura demain disparu pour de bon. Car oui, sa vie bien que loin d’être terminée fut chargée. Et c’est peut être pour se libérer un peu mentalement que Peyo a décidé de poser par écrit ses pensées. Le résultat ? Un livre de 288 pages qui s’inscrit dans la culture surf. 

Car il y a vingt ans presque jour pour jour, une équipe de surfeurs, dont Peyo Lizarazu, à l’initiative du projet, affrontait pour la première fois la vague géante et fugace de Belharra au large de la corniche basque. À partir du récit de cette belle aventure, le surfeur de 47 ans propose dans ce livre, son tout premier, un périple amoureux jalonné de ses plus belles rencontres humaines et de sensations fortes sur les plus mythiques spots de la planète. Le Basque en profite pour livrer sa vision du « sport des rois naturels de la terre » (Jack London), mais aussi et bien sûr de ses reines, à travers des portraits, témoignages et entretiens inédits.

Véritable « waterman », homme de toutes les pratiques océaniques, Peyo Lizarazu est accompagné depuis les débuts de sa carrière et ses premiers titres internationaux par les meilleurs photographes de surf. Leurs plus beaux clichés, ainsi que des photographies plus intimes, illustrent cet ouvrage qui met en valeur les plus belles vagues et les meilleurs spots qu’il a eu la chance de surfer.

Peyo Lizarazu – « Ce fut un projet qui a pris du temps. Je suis dessus depuis plus de 2 ans. L’idée a été, alors qu’on vient de fêter les 20 ans de Belharra, de faire un livre qui parle de surf et qui serait un prétexte pour parler de Belharra et du 20e anniversaire. Mais Belharra n’est pas le seul sujet du bouquin et n’est pas la plus grande partie du livre. Ce dernier propose surtout des séries de petits textes, des anecdotes, illustrées par des photos. On passe d’Hawaii à Tahiti en passant par des pays de froid aussi sans oublier la France »

Sentirait-on pointer une once de nostalgie ? 

« Pas du tout. Aucune nostalgie. Je ne m’inscris clairement pas dans le c’était mieux avant, ça se veut être un témoignage de choses qui évoluent. Ce que j’ai essayé de faire c’est des contrepieds » nous précise Peyo. « J’avais 9 ans avec mon cousin quand j’ai commencé à surfer ici à St-Jean. C’était une fin d’été, juste avant la reprise et ça me paraissait énorme… A part quelques sessions de pirogues et de surf debout à la rame entre 1998 et 2018, je n’ai jamais trop surfé dans la baie. Aujourd’hui, grâce au foil, je viens rejouer ici avec un nouveau support. Donc non, pas de nostalgie avec ce livre, juste un témoignage pour que les gens comprennent qu’à une époque, on apprenait à surfer parce qu’on avait quelqu’un de sa famille qui savait surfer ou qu’un ami nous y mettait. Les écoles de surf n’existaient pas, on n’avait pas de prévisions météo… On a commencé à surfer avec des combinaisons de plongée…donc non ce n’était pas forcément mieux avant. J’ai appris à lire des cartes isobariques avec ce que ça implique comme imprécisions. Aujourd’hui, on a des prévisions beaucoup plus précises ! Je n’ai jamais habité à côté de la plage, à Hendaye, j’habitais un peu sur les hauteurs. Je n’avais pas de vue plage, mais j’avais une vue sur la Bidassoa. Et pendant longtemps, dans ma jeunesse, je croyais que le simple fait que la marée monte était ce qui créait des vagues… Non ce n’était pas tout le temps mieux avant. Oui aujourd’hui il y a du monde à l’eau, mais je fais parti de ceux qui n’ont pas à se plaindre. On arrive encore à tirer notre épingle du jeu. Le surf évolue et faut surfer le mouvement ».  

De ses débuts en surf dans la baie de St-Jean avec son cousin après avoir commencé à Hendaye, à Belharra en passant par Tahiti, le Royaume-UniHawaii ou l’AustraliePeyo raconte sa vie. Ses vies. Il revient sur sa première planche fabriquée par son père et reçue à l’âge de 7 ans, mais aussi sur sa carrière de rugby qui l’a un temps éloignée du surf. « Le rugby m’a vite pris de plus en plus de temps (…) mais si je n’avais pas fait autant de sports collectifs dans ma vie, je n’aurais pas surfé comme ça ». 

Dans ce libre, Peyo n’évite aucun sujet. Les piscines à vagues, l’évolution du matériel, sans oublier bien évidemment de parler de la dimension collective dans le surf de gros, indispensable à ses yeux. 

Longtemps réfractaire aux Big Waves Awards, Peyo nous apprend lors de notre interview qu’il a intégré depuis 2 ans maintenant le jury des Awards. 

« Si je voulais que le système bouge, il fallait le faire bouger de l’intérieur » nous a-t-il confié. « J’ai accepté la demande de mon ami Jamie Mitchell mais avec l’envie de leur mettre la pression et avec un objectif simple : faire en sorte que les pilotes de jet ski soient aussi honorés que le surfeur. Et je voulais aussi faire supprimer la catégorie du Wipeout. Ce qui est désormais chose faite. Le surf engagé oui, mais du surf engagé intelligent. La chute ce n’est pas intelligent. On ne peut pas pousser à ça, c’est dangereux et ce n’est pas flatteur ». 

Sur les préfaces

Laird Hamilton, Frédéric Beigbeider et Béatrice Molle-Haran.

« Laird est quelqu’un dont je suis proche. C’est quelqu’un qui pour moi est un mentor et c’était naturel de lui demander, il a de suite accepté. Fred (Beigbeider), je ne le connais pas depuis longtemps mais depuis l’année dernière on se croise souvent à l’école maternelle car on a nos enfants au même endroit. Béatrice quant à elle est une journaliste de l’AFP à la retraite, c’est une amie de la famille. J’étais curieux avec Béatrice et Fred de voir ce que des personnes qui connaissent le surf en simple observateur sans être pratiquant pouvaient penser d’un tel livre, ça s’est donc fait naturellement avec une préface très surf avec Laird et ces deux autres personnes qui, bien qu’elles ne surfent pas, connaissent bien la côte basque ».

Bref, un libre passionnant qui revient sur la longue carrière d’un homme aux milles vies.

Il est 17h30 et la baie de Saint-Jean tombe dans la pénombre d’hiver. Le soleil est déjà couché et les derniers foileurs sortent de l’eau. On sent qu’on pourrait rester des heures encore à discuter, mais il est temps d’y aller.

Infos pratiques

– 288 pages – 39,95 €

– Livre paru le 28 octobre 2022 

– Avec la collaboration d’Hervé Manificat

– Préfaces de Laird Hamilton et Frédéric Beigbeider | Avant-propos de Béatrice Molle-Haran | Dessins de Soledad Bravi                  


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